Quelles solutions pour endiguer la menace de dégradation qui plane sur l’écosystème marin et côtier de la Côte d’Ivoire ? Le projet de gestion intégrée de l’aire marine et côtière d’Abidjan à Assinie (GIAMAA) en est certainement une. Un atelier portant sur ledit projet se tient à Grand-Bassam depuis le lundi 31 mai pour s’achever ce samedi 05 juin 2021. Objectif, mettre en place un outil de planification spatiale opérationnelle en vue d’une utilisation durable de l’espace marin et côtier de la Côte d’Ivoire.
Occupées par 30% de la population ivoirienne pratiquant diverses activités, dominées par aune forte implantation d’unités industrielles du pays, ainsi que les deux ports et l’aéroport international, les zones côtières ivoiriennes sont indubitablement des territoires très attractifs. De ce fait, tout le littoral, long de 556 km et couvrant une superficie de 23 253 km2, soit 27% de la superficie de la Côte d’Ivoire, fait l’objet d’une menace environnementale qui ne dit pas son nom.
L’on assiste à la dégradation et la destruction des écosystèmes marin et côtier, à la pollution industrielle et domestique, à l’érosion côtière, à la disparition de certaines espèces animales et végétales etc. Il apparait clairement que si rien n’est fait, la zone marine et côtière de la Côte d’Ivoire perdra sa richesse en biodiversité et en ressources naturelles. A ces menaces, il faut ajouter les activités qui se déroulent de manière non coordonnées, qui ne prennent pas en compte les questions de protection de l’environnement, ni de préservation des ressources marines et côtières, ainsi que les conflits d’usage qui sont autant de difficultés à résoudre. Voilà le sens de ce projet.
Agissant en futurisme, le ministère ivoirien de l’environnement et du développement durable s’est lancé à la recherche d’une solution durable à cette équation à multiple inconnue. La solution en expérimentation qui semble être la panacée est le projet dénommé : Gestion Intégrée de l’Aire Marine et côtière d’Abidjan à Assinie (GIAMAA). Un projet dont la Côte d’Ivoire est bénéficiaire depuis 2019 et qui est piloté par le Centre Ivoirien Antipollution (CIAPOL). Il est financé par le gouvernement Allemand et la Banque Mondiale (à travers le projet WACA) et mis en œuvre dans le cadre du projet régionale de gestion intégrée des océans exécuté par le secrétariat exécutif de la Convention d’Abidjan et le Centre d’Expertise Norvégien GRID Arendal.
C’est autour de cet important projet qu’une soixantaine d’experts environnementaux ont pendant six jours mené des réflexions lors de l’atelier de consultation intersectorielle des parties prenantes sur la cartographie des usages et l’élaboration des différents scénarii d’utilisation de l’espace marin et côtier de Grand-Bassam. Un atelier présidé par François Kouablan, Directeur de cabinet au ministère de l’environnement et du développement durable qui représentait le ministre Jean-Luc Assi. En ligne de mire, la Planification Spatiale Marine (PSM), qui constitue l’outil central du projet GIAMAA et qui vise le zonage des occupations. La ville balnéaire de Grand-Bassam a été choisie pour la phase expérimentale.
A l’ouverture de l’atelier, François Kouablan a rappelé l’importance de ce projet pour la Côte d’Ivoire. « La nécessité de disposer d’un plan d’aménagement de l’espace marin et côtier de la Côte d‘Ivoire est plus qu’urgent », a-t-il souligné. Du côté de la Convention d’Abidjan, on est plus qu’optimiste quant à la nouvelle image que les experts vont donner au littoral ivoirien. «Vous allez ainsi vous atteler, au cours de ces journées, à dessiner un futur positif, riche et durable pour notre littoral », a affirmé Dr Jacques Abé qui représentait le secrétaire exécutif de la Convention d’Abidjan, Abou Bamba.
Le CIAPOL, structure technique nationale chargée de la mise en œuvre du projet ne peut que se réjouir de cette initiative prometteuse. « Je suis convaincu que notre implication, en tant que gestionnaire et utilisateur de l’espace marin, dans la mise en place d’outils de développement des aires marines en Côte d’Ivoire, permettra de débloquer leur potentiel économique pour le bien-être des générations présentes et futures », dixit le Directeur Général du CIAPOL, Dibi Gnagne Martin. Au terme des travaux, les cartes des usages futurs devraient être élaborées et validées, de même que les scénarii d’évolution de l’espace marin et côtier de Grand-Bassam. Pour ce faire, des visites de terrain sont prévues au cours de cet atelier.
Il n’est point prétentieux de dire que l’espoir reste de mise quant à l’issue de ce projet GIAMAA axé sur la planification spatiale, vu l’énorme travail abattu jusque-là par la coordonnatrice Mme Bekoin Marguerite et son équipe. Selon elle, il appartient aux parties prenantes de se fixer une vision sur ce que doit être notre zone côtière et marine d’ici 5 ans, 10 ans… « Si nous ne nous donnons pas une vision futuriste qui intègre à la fois utilisation de l’espace marin et côtier, et protection de l’état de l’environnement marin et côtier, et que nous continuons d’aller en rang dispersé dans l’utilisation de ces ressources, il est clair qu’à un moment donné, on n’aura plus ces biens et services que ces écosystèmes marins et côtiers nous rendent », prévient-t-elle.
Rappelons que l’équipe projet a procédé déjà en mars 2021 à l’identification du site et à la mise en place d’une équipe scientifique pluridimensionnelle chargée de conduire le processus. Ensuite, il y a eu la première consultation intersectorielle pour l’identification de toutes les parties prenantes de l’espace marin et côtier de Grand-Bassam, suivi en juillet 2020 de l’appel à candidature pour le recrutement d’un consultant juridique chargé d’évaluer le cadre juridique et institutionnel de la Côte d’Ivoire en matière de planification spatiale marine.
Il a fallu aussi une formation en septembre 2020 sur l’utilisation du logiciel de cartographie dénommé SEASKETCH. Sans oublier l’élaboration et la validation du plan du rapport sur la Planification Spatiale Marine (SPM) en novembre 2020. Aussi faudrait-il ajouter les trois différentes missions de collecte de données et surtout la première réunion du comité de pilotage qui a permis de présenter les trois outils de gestion intégrée des océans qui sont développés dans le cadre du projet GIAMAA, à savoir le Rapport sur l’Etat de l’environnement Marin (REEM), les Zones Marines d’Importance Ecologique et Biologique (ZIEB) et la Planification Spatiale Marine (PSM). Tous accompagnés par un certain nombre d’activités avec à la clé l’atelier de renforcement des capacités des parties prenante sur la PSM tenu en février 2021 à Bonoua.
Malgré ces avancées notables dans le processus de Planification Spatiale Marine, force est de reconnaitre que de nombreux défis restent à relever. En témoignent les prochaines étapes que sont la validation de la proposition de zonage, l’élaboration et la validation de la cartographie des usages futurs qui nécessitent une collecte de donnée auprès de toutes les parties prenantes, l’élaboration et le validation du plan de gestion de l’espace marin et côtier de Grand-Bassam, la validation du rapport d’évaluation du cadre juridique et institutionnel national relatif à la PSM etc…
Mme Bakoin et ses collaborateurs parviendront-ils à relever ces défis pour ainsi conduire l’espace marin et côtier ivoirien vers une gestion de plus en plus durable ? Attendons de voir.
GEORGES KOUASSI
k.georges@afriquegreenside.com